« Il y a une grande incertitude quant à l’avenir. À la Réserve fédérale, nous sommes fermement déterminés à utiliser nos outils pour faire tout ce que nous pouvons, et aussi longtemps qu’il le faudra, à apporter un certain soulagement et stabilité, veiller à ce que la reprise soit aussi forte que possible et limiter les dommages durables à l’économie ». Au cours de sa conférence de presse du mercredi 10 juin, Jerome Powell s’est voulu réaliste. Il a décrit le choc violent en cours en quelques chiffres. La baisse du PIB du 2ème trimestre sera la plus forte historique. Environ vingt millions d’Américains ont perdu leur emploi. Le taux de chômage en mai aurait ainsi dû être à 16,3% et non à 13,3% comme publié officiellement, du fait de travailleurs ne s’étant pas déclarés comme chômeurs. Cette photo de la situation actuelle a semé le trouble auprès des investisseurs. Ces derniers ont massivement vendu les valeurs cycliques et bancaires dans la séance suivante. Est-ce la fin du formidable rallye enregistré ces dernières semaines ? Il est encore trop tôt pour le dire. En adoptant ce langage, le président de la FED a surtout voulu calmer l’euphorie et assurer que l’institution poursuivra une politique accommodante pour longtemps. Le but a été clairement énoncé, à savoir ne pas tomber dans l’irréalisme et assurer une liquidité abondante pour maintenir les taux bas. C’est une attitude saine.
Le fort recul des marchés financiers en ce jeudi 11 juin n’est pas entièrement imputable à la banque centrale américaine, loin de là. Tout d’abord, celui-ci intervient après une phase technique de sur-achats, et après une série de prévisions économiques révisées à la baisse. Ainsi, l’OCDE vient de publier ses dernières estimations pour 2020. La décroissance mondiale est dorénavant estimée à 5,2 % dont 7,3 % aux États-Unis et 9,1 % pour la zone euro. La France est durement touchée avec une chute de 11,4 %. Ensuite, c’est la crainte d’une seconde vague du Covid-19 qui a surtout affolé les opérateurs. Dans ce scénario, le PIB mondiale devrait reculer de 7,6 %, soit 8,5 % pour les États-Unis et 11,5 % pour la zone euro. Cette éventualité a soudain refait surface avec les dernières statistiques de nouveaux cas outre-Atlantique. Ceuxci ne faiblissent pas et restent ancrés au-dessus du niveau quotidien des 20 000 patients. C’est surtout l’accélération dans 21 états (dont la Californie, le Texas et la Floride) qui affole. En réalité, il ne s’agit pas de seconde vague mais bien du prolongement d’une première épidémie pas encore maîtrisée. Néanmoins, la situation diffère selon les mesures adoptées par les gouverneurs. Ainsi, les principaux états de l’Est et du Nord (New-York, New Jersey, Illinois et Massachussetts), durement touchés, ont adopté des mesures de confinement strictes à l’européenne. Le sacrifice paye et le virus recule nettement. Cela confirme que nous sommes passés au stade de pandémie à celui d’une maladie chronique, avec laquelle nous devons vivre. Notre attitude au quotidien est donc cruciale et nos habitudes de consommation vont déterminer l’ampleur de la reprise. L’OCDE a souligné que nous devons courir un marathon en trois phases et non un sprint. Après la phase 1 qualifiée « d’endiguement », nous sommes en phase 2 « vivre avec le Covid-19 ». La reprise sera solide, durable et inclusive uniquement en phase 3 quand un vaccin et/ou traitement sera disponible.