Non, ce n’est pas un nouveau « French paradox ». L’indice CAC 40 est au plus haut depuis juin 2007, alors que la France connaît un troisième confinement national. Si on intègre les dividendes, cet indicateur a battu son précédent record historique, datant de février 2020. Bien qu’étrange, cette situation n’est pas propre à l’Hexagone. C’est également le cas chez nos voisins allemands et hollandais. Cette dichotomie, entre des marchés au firmament et une crise sanitaire aiguë, suscite toujours des interrogations, voir des inquiétudes. Les investisseurs sont-ils déconnectés de la réalité ? Sommes-nous dans une bulle boursière ? La réponse à ces deux questions est oui, si aucune perspective d’amélioration ne se dessinait. Et c’est non, si l’on se réfère au fort redémarrage imminent de l’économie américaine et à la montée en charge de la vaccination en Europe.
Nous avons beaucoup appris depuis le premier confinement, qui date de plus d’un an. La première leçon est positive : le rebond de l’économie qui a suivi cette période de restrictions a été très important. La seconde conclusion est très inquiétante : malgré tous nos efforts et le dévouement de nos soignants, nous n’arrivons pas à éviter une saturation de nos hôpitaux. Cette évidence ne justifierait pas le niveau actuel des marchés, si nous étions contraints de fermer des pans entiers de notre économie à des fréquences régulières. Fort heureusement, les exemples concrets de pays en avance dans leur stratégie vaccinale démontre qu’il est possible de déconfiner, avec une épidémie qui continue de régresser. En Israël, où plus de 90 % des plus de 50 ans ont reçu au moins une première dose, le nombre quotidien de nouveau cas, d’hospitalisations et de décès ont continué de se réduire, malgré la réouverture des bars, des restaurants et des lieux culturels, dès le 7 mars.
Le scénario d’un retour à la normale aux États-Unis devrait se concrétiser au cours de ce trimestre, en dépit d’une résurgence récente du nombre de cas de Covid-19 depuis la fameuse pause pascale des étudiants. En effet, selon le CDC (« Centers for Disease Control and Prevention »), 77 % des plus de 65 ans ont reçu une première dose au 8 avril. La logistique américaine est en marche avec un rythme quotidien de plus de trois millions de doses administrées. C’est donc en toute logique que 916 000 emplois non agricoles ont été créées en mars. De surcroît, au cours de ce même mois, les chiffres du PMI des services est au plus haut depuis plus de trois ans à 60,4. Le secteur manufacturier reste robuste avec un indicateur ISM et PMI respectivement à 64,7 et 59,1. De facto, la reprise est plus qu’amorcée.
Et l’Europe dans tout cela ? Le retard est important mais le rythme s’accélère, car les doses arrivent enfin. La Commission européenne en attend 360 millions ce trimestre contre à peine 100 millions précédemment. En France, le cap des dix millions de premières doses inoculées a été franchi, soit 15 % de la population. Toutefois, il est crucial de changer de braquet pour réussir la saison estivale, sans devoir reconfiner en automne. La remarquable cadence récente de 300 000 injections quotidiennes doit être dépasser. En effet, La population âgée de plus de 50 ans représente 27 millions de Français. Si l’on intègre la tranche des plus de 40 ans, ce chiffre passe à 35 millions. Avec les nouveaux variants, plus de 800 personnes de cette catégorie sont hospitalisées tous les jours. Le compte à rebours est désormais enclenché. Nous avons 90 jours pour réussir notre stratégie vaccinale d’ici fin juin, dans le but de vivre normalement avec un virus du SARS-CoV-2, toujours présent et mutant. Cet objectif est réalisable.