Les investisseurs redoutaient un mauvais chiffre d’inflation aux États-Unis et ils ont eu raison. La hausse des prix sur un an en avril a donc été de 4,2% en nominal et de 3% hors alimentation et énergie. Ces chiffres sont bien supérieurs aux attentes (respectivement à 3,6% et 2,3%). Ce sont également les données les plus élevées depuis septembre 2008, pour l’indice nominal, et depuis janvier 1996 (25 ans), pour l’indice de base. À cette époque, la cible maximale des taux directeurs de la FED était de 5,5% contre 0,25% aujourd’hui ! Il est évident que l’effet de base a énormément joué depuis l’année dernière, période de confinement plus stricte qu’aujourd’hui, où le prix des matières premières était au plus bas depuis 2016. Cependant, le retour, même provisoire, de l’inflation va avoir des conséquences sur la politique monétaire des banques centrales et sur la valorisation des actifs. La crédibilité du discours rassurant des grands argentiers sur ce phénomène transitoire va être remise en question, le temps que les choses se normalisent. Plus cette période durera, plus la pression exercée sur ces institutions sera forte.
L’inflation de base est moins volatile que l’inflation nominale, car elle ne subit pas les fortes variations du prix de l’énergie et des denrées alimentaires, du fait d’aléas saisonniers et climatiques. C’est en théorie le reflet le plus juste de la réalité. Le souci est qu’actuellement celle-ci se situe désormais à 3% contre un objectif de 2% pour la FED. Historiquement, les replis enregistrés après un pic sont longs à se concrétiser, à l’exception des gros chocs économiques de 2008 et de 2020, avec des baisses respectives de 0,7% et de 1% en deux à trois mois. La croissance attendue ces prochains trimestres est forte, compte tenu du déconfinement en cours. On peut donc estimer un délai nécessaire de 3 à 6 mois avant une normalisation, surtout quand on observe des tensions, comme actuellement, sur les chaînes d’approvisionnement. De surcroît, la hausse des prix à la production est ressortie à 6,2% sur un an en avril. Par conséquent, les prochaines réunions du 10 et du 16 juin de la BCE et de la FED seront très attendues, pour obtenir des précisions sur les programmes d’achats d’actifs et sur le calendrier d’une possible réduction de ceux-ci (« Tapering »). En ce qui concerne le niveau des taux courts, les contrats à terme sur les Fed Funds n’anticipent pas de hausse, pour le moment, avant l’automne 2022.
Cet évènement ne modifie que marginalement nos allocations d’actifs, déjà axées sur la thématique de la reflation (fort rebond à venir de la croissance économique couplée à un retour plus perturbant de l’inflation). À court terme, une hausse de la volatilité est à prévoir, mais la tendance de moyen-terme sur les actions reste positive.