Les investisseurs ont baissé leur exposition au Vieux continent depuis le 24 février dernier, date de l’invasion de l’Ukraine. La proximité du conflit, la dépendance énergétique au gaz russe et une nouvelle crise migratoire à gérer sont des arguments valables pour privilégier les autres zones géographiques. Pourtant, sur le plan microéconomique, le match est loin d’être perdu, bien au contraire. En effet, depuis le début de la saison des résultats du premier trimestre, à peine 40 % et 28 % des entreprises des indices S&P 500 et STOXX Europe 600 ont communiqué. À ce jour, les publications des sociétés européennes sont beaucoup plus rassurantes que celles de leurs consœurs américaines. Ainsi, les bénéfices par action ont été supérieurs aux attentes de 9 % en Europe contre 6 % aux États-Unis, avec une baisse des titres beaucoup moins prononcée en cas de mauvaise nouvelle (-0,3 % contre -1,9 %).
Ce constat est beaucoup plus flagrant sur les valeurs technologiques. Après la chute de 35 % du cours de Netflix en une séance, c’était la semaine de tous les dangers pour les poids lourds de la cote (les fameux GAFAM), car les déceptions se paient très cher. Le bilan hebdomadaire est bien mitigé. Les bons élèves ce trimestre ont été Microsoft, Facebook et Apple, qui ont annoncé des profits supérieurs aux attentes. Les déceptions ont concerné Alphabet (Google) et surtout Amazon, qui a enregistré une perte conséquente de 3,8 milliards de pertes, une première depuis 2015. De facto, les estimations des bénéfices par action pour l’indice Nasdaq commencent à s’effriter. C’est historiquement, un indicateur de moins bonne dynamique pour les marchés. Toutefois, à ce stade un rebond des valeurs technologiques est possible.
En effet, la baisse enregistrée ces dernières semaines, sur fonds d’anticipation de hausses de taux plus prononcées de la Fed et des résultats plus nuancés, cumulés avec un sentiment extrêmement négatif et proche des plus bas historiques, intègrent déjà un scénario assez négatif. Toutefois, si rebond il y a, il resterait limité sans reprise de croissance des profits. En effet, même si la valorisation redevient raisonnable, à 22,5 fois les bénéfices estimés de 2022, nous sommes toujours dans une ère de compression des multiples liés à la hausse des taux longs.
Néanmoins, cette situation est pour le moment cantonnée à l’indice NASDAQ. Du fait des bonnes surprises énumérées au début de cet édito, les révisions positives des résultats continuent de progresser, même à un rythme très modeste, pour les indices Stoxx Europe 600 et S&P 500. Malgré des publications solides, rares sont les entreprises qui ont relevé leurs guidance 2022. Les pessimistes interprètent ce phénomène, comme un signal annonciateur de prochains trimestres plus faibles. Nous ne partageons pas cet avis, car nous avons sentiment que c’est par excès de conservatisme. En effet, dans cet environnement si particulier et si compliqué, il vaut mieux surprendre positivement que décevoir. Les dirigeants gardent un peu de résultats sous le pied. Au niveau de l’activité, les chiffres d’affaires ressortent en croissance de 11 % et de 9 % sur un an glissant. On est loin de la récession que certains semblent annoncer. La contraction du PIB américain de 1,4 % au premier trimestre est principalement liée à un phénomène de baisse des stocks et de dégradation du solde des échanges commerciaux. La consommation est ressortie en hausse à 2,7 %.