C’est inédit depuis avril 2011. La BCE vient d’initier, ce jeudi 21 juillet, un nouveau cycle de durcissement monétaire, en remontant tous ses taux directeurs de 0,50%. Elle met fin également à l’ère des taux de dépôt négatifs, initiée en septembre 2014. Ces huit années, incompréhensibles pour un grand nombre d’épargnants où il fallait payer pour déposer de l’argent, sont donc révolues. Cette décision a surpris par son ampleur (0,50% au lieu de 0,25%), mais n’a pas entrainé les rendements obligataires à la hausse, pour deux raisons. La première est que le scénario de récession se renforce de jour en jour, avec des indicateurs macroéconomiques dégradés. La seconde, est que la BCE a indiqué dans son communiqué, que la suite de sa politique de normalisation dépendra des données d’activité qui lui seront disponibles. De ce fait, la prévision initiale d’une hausse de 0,50% lors de sa prochaine réunion de septembre n’est pas acquise. De surcroît, sa présidente a pris soin de préciser, lors de sa conférence de presse, que cette accélération du calendrier ne signifiait pas des taux plus élevés à moyen terme. Le message semble donc bien être compris.
Au cours de cette même conférence de presse, un journaliste a abordé le sujet de la récession à venir dans la zone euro. Christine Lagarde a répété que les données actuelles ne présageaient pas un tel scénario, mais a reconnu que beaucoup de nuages apparaissaient à l’horizon. Celui-ci sera donc révisé en fonction des prochains chiffres économiques. À ce stade, il nous semble pertinent de se poser la question sur la durée de ce nouveau cycle de hausses de taux, surtout si on se réfère historiquement aux deux périodes précédentes de 2008 et de 2011, qui n’avaient pas dépassé six mois. Dans ces deux cas, l’institution monétaire avait agi trop tardivement et maladroitement pour n’effectuer qu’une seule hausse de 0,25% en juillet 2008, avant la crise financière, et deux hausses de 0,25% en avril et juillet 2011, avant la crise des dettes souveraines européennes. L’histoire se répètera-elle ? Sans avoir la prétention de la prédire, et sauf redémarrage économique d’ici la fin de l’année, malgré la crise énergétique qui s’annonce cet automne, il est fort probable que l’institution monétaire adoptera une pause d’ici sa réunion du 2 février 2023.
Dans cet environnement perturbé, nous assistons, à un nouveau paradoxe des marchés financiers, avec une progression des cours des actions et des obligations. Beaucoup d’opérateurs s’interrogent sur ce rallye dit de soulagement, qui intervient alors que le moral des investisseurs est au plus bas, le ralentissement de l’activité est prononcé, et que les banques centrales durcissent leur politique monétaire. L’explication est toute trouvée, car depuis la forte chute des actifs lors de la première quinzaine de juin, le risque dans les portefeuilles a été fortement réduit, pour passer l’été au frais pendant cette période de canicule. Lors d’un sondage effectué auprès d’investisseurs américains par Bank of America, la très grande majorité d’entre eux trouvait le niveau du marché attractif, mais estimait que le point bas n’était pas encore atteint. En attendant de le connaître, la chasse aux bonnes affaires et surtout aux valeurs de croissance a eu raison, sans doute temporairement, de la baisse, surtout après le début de la saison des résultats du deuxième trimestre, qui n’entraîne toujours pas des révisions des estimations des bénéfices par actions pour 2022 et 2023. Cette résistance est plus que jamais salutaire et surprend les pessimistes, qui n’ont pas vu venir la réouverture, même modérée, du gazoduc Nordstream 1. Un élément de plus pour détendre cette atmosphère tendue dans les salles de marchés et suffocante à l’extérieure à cause de la chaleur et des incendies..