Et de deux ! L’indice d’inflation aux États-Unis est ressorti supérieur aux attentes en septembre (8,2 % en glissement annuel contre 8,1 %), pour le second mois consécutif. Certes le pic de 9,1 % enregistré en juin est passé, mais ce reflux est trop lent pour infléchir le durcissement monétaire de la Fed. Celleci devrait donc relever ses taux directeurs de 0,75 % le 2 novembre, lors de la prochaine réunion de ses gouverneurs dite « FOMC ». Désormais, on ne se fait plus d’illusion, car les anticipations du taux maximal en fin de cycle de ce resserrement approchent les 5 % pour mi-2023. Le marché a encore une fois mal réagi après l’annonce, lors de la séance du 13 octobre. Mais ce chiffre fétiche pour les superstitieux a porté malheur aux vendeurs, puisque la forte baisse des indices, enregistrée dans l’heure qui suit la publication de la statistique, a été entièrement effacée. L’indice Nasdaq 100 a été une fois encore le plus « chahuté », puisqu’il clôture en hausse de 1,35 %, après avoir cédé momentanément jusqu’à 3,20 %. Les cardiaques doivent s’abstenir !
Au-delà de cette agitation quotidienne et permanente, prenons de la hauteur. Le scénario de fond n’a pas bougé : hausse des taux longs et ralentissement économique, voire récession. Les gérants l’ont déjà intégré dans leurs portefeuilles, avec des pondérations actions au minimum et des durations obligataires extrêmement réduites. L’annonce d’une inflation de base de 0,6 % sur un mois et de 6,6 % sur un an glissant est évidemment préoccupante. Celle-ci devrait toutefois ralentir au fil des mois. De surcroît, des considérations techniques sont à prendre en compte. Les positions sur les dérivés sont importantes, car le taux de couverture est élevé et les stratégies de volatilité sont très populaires. Des fortes variations d’indices à l’ouverture permettent à leurs détenteurs de déboucler leurs positions facilement avec des profits substantiels. En revanche, les contreparties (en gamma négatif) sont contraintes de se couvrir en achetant le sous-jacent.
L’autre facteur de cette résistance des marchés actions est que nous sommes à l’aube d’une nouvelle saison de résultats trimestriels. En Europe, la dépréciation de l’euro est un facteur de soutien pour nos champions internationaux. Une fois de plus, LVMH a été à l’honneur, avec une croissance organique de 20 % et des revenus en hausse de 28 % sur les 9 premiers mois de 2022. La forte présence internationale du groupe permet de capter la demande là où elle se trouve. L’Asie redémarre à +6 % contre -8 % le trimestre précédent. Les Américains s’étant massivement déplacés en Europe, le Vieux Continent affiche une progression honorable de 36 %, bien supérieure à celle des États-Unis qui ralentit à +11 %. Nous allons donc vivre ces deux prochaines semaines au rythme de la microéconomie, plutôt que celui de la macroéconomie, qui a plombé les performances cette année. Les banques centrales prendront de nouveau le relais à partir du 27 octobre avec la BCE. Cette trêve automnale peut être bénéfique aux marchés, à conditions que les publications soient à la hauteur. Nous serons assez vite fixés, avec quatre banques américaines (JP Morgan, Citigroup, Wells Fargo et Morgan Stanley) et le poids lourd de la santé UnitedHealth Group, qui publient aujourd’hui, soit l’équivalent de plus de 13,5 % de l’indice Dow Jones. On l’a donc compris, l’ambiance est loin de celle d’un long fleuve tranquille. On se met à rêver avec le poème « l’Invitation au voyage » de Charles Baudelaire et de son fameux « luxe, calme et volupté ». En ce moment, on se contente du luxe et de la volatilité dans les portefeuilles.