L’année écoulée restera négativement gravée dans les mémoires, avec plusieurs chocs émotionnels. Tout d’abord, nous nous sommes réveillés le 24 février, avec la stupeur d’une guerre meurtrière en Europe de l’Est et la menace bien réelle d’une extension de conflit à tous les pays de l’Union européenne. Ce risque géopolitique a été sous-estimé et a provoqué une chute brutale des actions européennes jusqu’au 8 mars de 8,56 %, selon l’indice Stoxx Europe 600, avec les valeurs bancaires, telle la Société Générale (-32 %), en victimes collatérales. Avec la flambée des cours des matières premières énergétiques et alimentaires, l’inflation qualifiée auparavant de transitoire, car liée à la pandémie, est devenue soudain durable et violente. Cela s’est traduit par un pic d’inflation de 9,06 %, en juin aux États-Unis, et de 10,70 % en octobre en zone euro, une première depuis 1980. Par répercussion, cela a mis un terme à la complaisance des banques centrales, qui ont adopté des politiques monétaires beaucoup plus restrictives. Nous avons ainsi assisté en 2022 à la plus forte hausse des taux directeurs de la Fed depuis 1982, passant de 0,25 % à 4,50 %. En Europe, pour la première fois depuis 2014, la BCE a abandonné son taux de dépôt négatif en juillet. Dorénavant, le taux actuel de rémunération en dollar et en euro sur le marché monétaire est supérieur à respectivement 4,50 % et à 2 %. Le cash redevient une classe d’actifs à part entière dans les allocations de portefeuilles. Même si ces rendements ne couvrent pas l’inflation, les liquidités constituent un placement transitoire, qui permettent d’attendre au chaud et sans précipitation, avant un réinvestissement qui tarde à cause d’un marché baissier aussi bien sur les actions que sur l’obligataire. Car le véritable choc financier de l’année écoulée a été sur les obligations, qui ont connu leur pire performance depuis 1948. À titre illustratif, l’indice FTSE World Government Bond Index a baissé de 18,26 % en dollar. La punition est relativement moins sévère sur les actions, puisque l’indice CAC40 dividendes réinvestis a corrigé de 9,50 % en 2022, à comparer avec 2018 (-10,95 %), et une chute beaucoup plus violente en 2011 (-16,95 %), en 2008 (-42,68 %) et en 2002 (-33,75 %). Évidemment, nous avons vécu une forte dichotomie entre les secteurs. Les valeurs technologiques ont le plus souffert, avec une perte de 32,97 % en dollar de l’indice Nasdaq 100. Celui de l’énergie est le grand gagnant de 2022 avec un gain de 59,04 % en dollar pour l’indice S&P500 Energy.
Quelles sont les perspectives pour 2023 ?
Le pic de l’inflation semble être passé des deux côtés de l’Atlantique. Nous sommes donc rentrés dans une période de désinflation (recul de la hausse des prix), historiquement plus favorable pour les actifs financiers. La compression des multiples de valorisation est donc bien entamée et le plus gros semble être derrière nous. De surcroît, la pénurie de gaz et d’électricité qui menaçait le Vieux Continent, semble être évitée pour cet hiver, grâce à une politique de stockage préventive efficace, une réduction de la consommation et à la douceur des températures. De facto, le cours du gaz spot TTE en euro (65) est repassé en-dessous de celui d’avant l’invasion en Ukraine (88,90 le 23 février), et se négocie bien en-deçà du pic de 338 le 26 août. Il semble également que le ralentissement économique soit plus faible que prévu, renforçant la probabilité d’une reprise au printemps, dans le sillage de la Chine. Nous sommes donc rentrés dans un mini cercle vertueux, un petit contre-choc à celui de 2022, en quelque sorte. Malheureusement, tout va dépendre du niveau à moyen terme de la hausse des prix. Or, pour le moment, il semble être trop élevé pour amadouer les banquiers centraux, qui prédisent une augmentation de 6,3 % aux États-Unis et de 5,5 % en zone euro. Nous restons prudents, mais moins pessimistes et achetons le marché dans les phases de baisse.