Qui l‘eût cru le 24 février 2022, le jour de l’invasion en Ukraine ? Malgré le choc géopolitique, énergétique, inflationniste et monétaire provoqué par ce conflit, la bourse de Paris a retrouvé, ce jeudi 12 janvier, son niveau d’avant, hors détachement des dividendes. Pourtant les risques persistent et les incertitudes demeurent quant à l’issue des évènements. Ce qui a vraiment changé, et qui explique l’attitude des investisseurs, c’est l’amélioration de ces facteurs disruptifs. Tout d’abord, les cours des matières premières (gaz et pétrole), qui sont au cœur de la guerre économique en toile de fond entre l’envahisseur et l’Occident, ont retrouvé également les cours de début 2022. De surcroît, la désinflation est bien entamée et l’inflation, qui rogne le pouvoir d’achat des ménages et les marges des entreprises, continue à ralentir. Ainsi, la hausse des prix aux États-Unis en décembre et sur un an glissant est ressortie à 6,5 % contre 7,1 % en novembre. L’abandon de la politique zéro covid en Chine laisse présager, non seulement un redémarrage de l’activité au printemps, mais également une normalisation de la chaîne d’approvisionnement mondiale. À ce titre, le prix du transport maritime, selon l’indice Baltic Dry index, a fortement chuté depuis son pic de d’octobre 2021 (976 maintenant contre 5 647). Le prix des importations aux États-Unis est en baisse depuis mai 2022.
Tout va-t-il pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Évidemment non. Les banques centrales peuvent poursuivre en 2023 le cycle de durcissement monétaire, le plus violent depuis plusieurs décennies, au-delà des anticipations du marché. Les risques géopolitiques peuvent ressurgir à tout moment et provoquer de nouveaux soubresauts. En revanche, un élément-clé, souvent sous-estimé, est la capacité des entreprises à s’adapter aux chocs exogènes. Comme toujours, on retrouve une forte dichotomie entre les valeurs. Depuis le 24 février, de nombreux titres affichent des performances boursières très honorables, même sans compter les dividendes records distribués en 2022 (plus de 56 milliards d’euros) sur les résultats de 2021, Les grands gagnants sont évidemment les titres dans l’armement (Thales +34,6 %), et du secteur de l’énergie (Total +20,9 %). Plusieurs sociétés ont démontré leur capacité à générer de la croissance, où elle se trouve et quelle que soit l’environnement économique. On retrouve le luxe : LVMH (+16,6 %) et Hermes International (+33,5 %), L’Oréal (+7,4 %) dans les cosmétiques et EssilorLuxofca (+6,9 %) dans l’optique. Certaines valeurs plus industrielles surfent sur la transition écologique et les besoins afférents en investissements massifs sur le long terme, avec des carnets de commandes bien remplis telles qu’Alstom (+8,5 %), Schneider Electric (+6,6 %), Air Liquide (+6 %) et Safran (+12,7 %). Dans l’automobile, Renault (+13,6 %) est une des étonnantes surprises, malgré son exposition en Russie et une baisse de ses profits, tandis que le cours de Stellantis (-16,8 %) ne reflète pas une progression de 17 % de ses revenus et de 45 % de ses bénéfices par action. Les bancaires ont été très affectées (Société Générale -21,6 % et Crédit Agricole -17,7 %), comme Unibail-Rodamco-Westfield (-17,6 %). Eurofins Scientific (-24,6 %) a souffert de la baisse de son activité Covid et Téléperformance (-24,1 %) de la controverse sociale liée à son activité en Colombie. Quid pour la suite de 2023 ? À court terme et après le fort rebond depuis le début de l’année, la saison des résultats qui commence est importante pour crédibiliser un consensus qui s‘a{end à une croissance des profits ce{e année, alors que nous sommes probablement et actuellement en récession. Certains oiseaux de mauvais augure attendent une baisse de 20 % des bénéfices par action en Europe. Les révisions bénéficiaires seront un facteur essentiel pour contrer toute éventuelles contractions des multiples de valorisation, liée à une remontée des taux longs dans le sillage des actions des banques centrales.