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Point macroéconomique

« Tous les coûts sont dans la facture » (Jacques Pater)

By 12 mai 2023mai 15th, 2023No Comments

« On juge un homme aux factures qu’il reçoit ». Cette citation du siècle passé, émanant d’un des membres des Marx Brothers, célèbre duo comique de l’époque, redevient d’actualité. En intervenant avec le Trésor américain dès le 12 mars dernier dans l’annonce du plan de sauvetage de Silicon Valley Bank et de Signature Bank, la FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation) nous a rappelé son rôle essentiel dans la stabilité du système financier américain. À cette occasion, cet organisme fédéral a pris une décision cruciale pour calmer la crise, à savoir l’extension de garante à tous les dépôts actuellement non assurés. Les épargnants et les institutions bancaires ont salué cette mesure, visant à résoudre le cœur du problème : ce sont les retraits massifs sur ces comptes qui ont provoqué la chute des deux banques régionales. Dans un communiqué du 11 mai, la FDIC a présenté la facture non réglée de ce double sauvetage : 15,8 Mds de dollars.

Rappelons qu’aux États-Unis, l’argent déposé à la banque est totalement assuré, en cas de faillite de celle-ci, jusqu’à 250 000 dollars. Au-delà de cette somme, la perte est totale. Cette garante existe depuis 1933, instaurée sous la présidence de Franklin Roosevelt, pour restaurer la confiance après la crise financière de 1929. Le plafond de 2 500 dollars de l’époque a été régulièrement relevé au fil du temps, surtout après la crise de 2008 pour atteindre le nouveau seuil précité. Donc, seuls en théorie les riches ou les entreprises ayant une certaine trésorerie sont concernés. La faille est qu’en cas de rumeur de faillite, les clients concernés retirent massivement leur argent. Dans une note publiée hier, la banque britannique Barclays soulignait que SVB (Silicon Valley Bank) a perdu 25 % de ses dépôts dans la seule journée du 9 mars. Les réseaux sociaux accélèrent et créent des flux massifs inédits. L’autre caractéristique qui a été fatale est la concentration des épargnants. Chez SVB, 10 clients détenaient 13,3 Mds de dollars tandis que 60 chez First Republic totalisaient 40 % des dépôts. Avec ses différents programmes d’actifs depuis deux décennies, la Fed a fortement augmenté les liquidités dans le système bancaire et de facto les dépôts bancaires, particulièrement ceux non assurés. Ceux-ci représentaient 40 % du montant total et les dépôts à vue ont atteint le chiffre colossal de 1 600 milliards de dollars début 2022, avant le début du durcissement monétaire. En augmentant rapidement son taux directeur de plus de 5 % pour contrer l’inflation, la Fed a certainement sous-estimé ces flux, à la recherche d’une rémunération meilleure vers des fonds monétaires et également le potentiel de pertes dans les bons du Trésor dans les livres de banques. C’est l’origine de la crise actuelle, dont l’onde de choc est accentuée en cas de rumeur de faillite d’une institution.

Qui va payer ces 15,8 milliards de dollars ?

Hier, la FDIC a annoncé que ce trou serait comblé par 113 institutions et que les plus grosses (celles avec plus de 50 milliards d’actifs) en paieraient 95 %, sous forme de cotisations supplémentaires pendant 8 trimestres. Les résultats de 2024 et de 2025 vont donc être impactés. Le problème est que la crise n’est pas terminée et que d’autres banques régionales comme PacWest sont au bord de la rupture. Cela milite en faveur de notre position de défiance à l’égard du secteur bancaire surtout américain. Néanmoins, les marchés financiers digèrent bien toutes ces mauvaises nouvelles. Le dernier chiffre de l’inflation outre-Atlantique en avril a continué sa régression à 4,9 % sur un an. Le mouvement de désinflation, qui stagnait depuis deux mois se prolonge, malgré un indice de base toujours élevé (5,5 %). Cela explique la bonne tenue des actions.