Ils sont quasi inconnus du grand public et pourtant leurs prises de parole sont scrutées en permanence par les investisseurs. Les gouverneurs des banques centrales sont des membres votants ou non votants des conseils en charge de la politique monétaire de leur institution. Les deux organismes les plus connus sont celui de la BCE (Conseil des gouverneurs) et celui de la FED (FOMC). Leurs prochaines réunions sont prévues respectivement le 9 et le 22 septembre. Depuis plusieurs semaines, on entend très clairement des voix discordantes s’exprimer presque quotidiennement sur l’évolution des mesures à adopter. La reprise économique, l’abondance actuelle de liquidités et le rebond récent de l’inflation, même transitoire, à un niveau supérieur à 2% (plus ou moins l’objectif de leur mandat) ont provoqué une vraie cacophonie entre les « faucons » et les « colombes ». Dans cette situation, tel un chef d’orchestre, le président doit taper sa baguette sur son pupitre afin que les musiciens jouent tous la même mélodie. L’exercice est réussi pour Jerome Powell au cours du symposium de Jackson Hole. Son discours a coché toutes les cases, en évoquant la mise en place, d’ici la fin de l’année, d’une possible réduction progressive du programme d’achats d’actifs de la FED, tout en excluant toute hausse de ses taux directeurs, sans le plein emploi retrouvé. Le marché a applaudi cette partition, exécutée sans fausse note, avec une baisse des taux longs et une hausse des actions.
Christine Lagarde devra faire de même au cours de la conférence de presse de jeudi prochain. L’Autrichien Holzmann a publiquement souhaité une réduction des achats d’obligations de la BCE. Ces propos ont provoqué une hausse des rendements. Il faut dire que le chiffre d’inflation nominale de la zone euro en août est ressorti à 3% sur un an glissant. C’est la résultante de tensions sur les cours des matières premières et de la chaîne d’approvisionnement mondiale. Les indices de prix à la production s’affolent, comme en Italie, où le dernier chiffre a battu en juillet un record historique de plusieurs décennies à 12,3%. On redoute donc une poursuite de la valse des étiquettes, alors qu’une modification de la politique monétaire de la BCE n’était pas prévue avant la mi-2022. L’exercice apparaît donc plus compliqué pour sa présidente qui devra trouver le bon tempo et contenter ses membres et les investisseurs.
En attendant, les indicateurs économiques continuent de faiblir. Le plus décevant a été le PMI chinois non manufacturier, qui est repassé sous la ligne de flottaison des 50 en août, à 47,5. A ce niveau, il laisse envisager un léger ralentissement de l’activité des secteurs non manufacturier. Ce sont les conséquences des restrictions sanitaires imposées par Pékin pour contrer le variant Delta. L’Asie est actuellement la zone la plus pénalisée par la crise sanitaire. Celle-ci semble avoir atteint un sommet récent et le potentiel de rebond y est toutefois important, malgré le retard des campagnes de vaccination. Les flux financiers en provenance des fonds et des ETF sont redevenus positifs dans les pays émergents, après plusieurs semaines de sorties. L’excédent de liquidités en Occident peut s’y reverser à tout moment, une fois la confiance retrouvée. C’est bien le dilemme actuel des pays développés qui doivent jongler entre les bienfaits d’une masse monétaire importante et les méfaits d’une inflation, même temporaire, trop élevée. Cette situation met mal à l’aise les banquiers centraux qui doivent ainsi modifier le dosage des perfusions actuelles.