Ce mot tant redouté circulait dans les salles de marché depuis presque 6 mois. La Fed vient d’annoncer, ce mercredi 3 novembre, un « tapering », c’est-à-dire une réduction de ses achats d’actifs. La banque centrale réduira mensuellement de 15 milliards de dollars ses acquisitions d’obligations souveraines et privées. Sauf imprévu, remettant en cause son scénario de reprise économique, elle mettra fin l’année prochaine à son quatrième programme d’expansion de son bilan (« quantitative easing »), initié en mars 2020. Désormais, celui-ci atteint la somme vertigineuse de 8 575 milliards de dollars, soit une progression de 4 400 milliards de dollars en 18 mois ! Ces injections massives de liquidités auront permis de maintenir des conditions de financement extrêmement favorables pour l’ensemble des acteurs économiques, malgré le choc d’une violence exceptionnelle de la pandémie de la Covid-19.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, nous accueillons favorablement cette décision de normaliser la politique monétaire, dans le sillage d’une amélioration économique et sanitaire. Si sa mise en place, à l’époque, était une évidence pour éviter une crise aigue de liquidités comme en 2008, sa prolongation au-delà des besoins nécessaires constituait une menace de distorsion pour le prix de nombreux actifs. En effet, le contexte actuel de rupture de la chaîne d’approvisionnement est synonyme d’une inflation plus élevée. Il est indéniable que le niveau actuel des taux longs réels (fortement négatif) a gonflé artificiellement le prix de l’immobilier, de certaines valeurs de croissance et de la crypto monnaie. Nous préférons donc un monde naturellement en croissance et sans artifice, à un monde sous perfusion. De surcroît, sortir des mesures de soutien non conventionnelles, permettra d’agir avec plus d’efficacité à la prochaine crise, sans rentrer dans une spirale perpétuelle addictive de liquidités.
Notre ultime argument, et sans aucun doute le plus important, repose sur le fait que l’histoire a démontré qu’un « tapering » est seulement un élément perturbateur des marchés à court terme, si les fondamentaux sont solides (croissance économique et des profits). Les records historiques et annuels des bourses américaines et du Cac 40 en sont une nouvelle fois la preuve. On vient de lever une inconnue pour les investisseurs, même s’il en existe encore de nombreuses, notamment celle de la hausse du coût des intrants, synonyme de baisse potentielle des marges. La communication préventive de la Fed, en écartant pour le moment toute hausse de ses taux directeurs, a permis de contenir la hausse des taux longs. Le mot inflation transitoire a été maintenu pour ne laisser aucune ambiguïté. Les opérateurs ont eu le temps d’ajuster en amont leurs positions sur le marché obligataire. Les gérants ont désormais des positions dites « courte en duration », c’est-à-dire des portefeuilles avec une sensibilité réduite en cas de baisse de leurs obligations. Les hedge funds ont même des positions spéculatives, misant sur la hausse des taux longs. Cela réduit le risque d’un mouvement de panique, qui pourrait entraîner des flux massifs vendeurs. L’action de la banque centrale était donc bien anticipée. De surcroît, La Banque d’Angleterre a surpris positivement ce jeudi en maintenant ses taux directeurs inchangés, entraînant un fort repli généralisé en séance des rendements européens et américains. Ce phénomène a été amplifié avec la résurgence épidémique en Europe. L’OMS a tiré la sonnette d’alarme, en annonçant un risque de 500 000 décès d’ici février prochain. Le Vieux Continent, comme Israël cet été, va devoir faire face à la perte d’efficacité de la deuxième dose. Les séniors seront probablement contraints de faire leur 3ème dose, faute de voir leur passe sanitaire retiré. Comme nous, les investisseurs excluent un scénario de reconfinement généralisé, ce qui permet aux indices boursiers de battre des records.