C’est un chiffre époustouflant communiqué discrètement par Alibaba, le spécialiste chinois de la vente en ligne. La valeur des marchandises vendues pendant les trois semaines du 13ème festival du shopping du 11 novembre a atteint un nouveau record (540 milliards de yuans soit 84,54 milliards de dollars au taux de change officiel). À titre de comparaison aux États-Unis en 2020, le chiffre d’affaires généré par les plateformes digitales au cours du Black Friday s’est élevé à 9 milliards de dollars. Chaque année depuis 2009, « The 11.11 Global Shopping Festival » est un évènement commercial majeur pour le géant de l’internet de l’Empire du Milieu. Commencé très modestement il y a 12 ans avec la participation de seulement 27 « commerçants », la logistique mise en œuvre donne dorénavant le tournis. Les produits de 290 000 marques dont 29 000 étrangères sont désormais proposées à cette gigantesque foire mondiale du commerce en ligne. C’est l’eldorado, non seulement pour les marchands locaux, mais aussi pour les fournisseurs non-résidents, puisque plus de 1,3 million de nouveaux articles en provenance de l’étranger ont été vendus.
Toutefois, le bilan carbone de la manifestation est mis en avant plutôt que son aspect pécunier. La bascule totale des moyens technologiques et opérationnels sur le cloud a permis d’économiser plus de 26 000 tonnes d’émissions de CO2. 500 000 références proposées ont reçu la certification « produits verts ». Un million de colis ont été livrés avec les nouveaux véhicules électrique autonomes « Xiamomanly », un volume équivalent à celui enregistré sur un an en septembre dernier. La société souligne également son utilité sociale, en annonçant que 65% des vendeurs sont des PME. En fait, Alibaba a fait profil bas et n’a pas claironné outrageusement ce nouveau succès, comme c’était l’usage dans le passé. Il faut dire que nous sommes rentrés dans une nouvelle ère politique, où l’expansion de l’économie autour d’internet n’est pas la bienvenue. Au royaume de la prospérité commune, le secteur fait l’objet d’une reprise en main musclée et il ne fait pas bon de communiquer sur les réussites individuelles et entrepreneuriales, comme le faisait son fondateur Jack Ma. D’ailleurs la journée du 11 novembre est née en 1990 par des étudiants de l’université de Nankin. L’objectif était de créer une journée identique à celle de la SaintValentin. C’est devenu le symbole d’une vaste journée de promotion commerciale depuis 2009, à l’initiative même d’Alibaba. Le phénomène est désormais rentré dans les mœurs, puisque 45% des acheteurs sont nés dans les années 1990 et 2000, en hausse de 25% chez les moins de 20 ans. Le jeune célibataire chinois aime consommer et bénéficier de réductions au cours de cette période qui est désormais devenue une institution.
Revenons en Occident, où la hausse des prix aux États-Unis en octobre a atteint un plus haut niveau historique depuis 30 ans. L’indice d’inflation sur un an glissant est ainsi ressorti à 6,2% en nominal et à 4,6% hors alimentation et énergie. L’affaire est devenue politique avec une allocution musclée de Joe Biden. Les taux longs se sont tendus, ainsi que les anticipations d’inflation, puisque les points morts des obligations indexées sont remontés à 3,10% sur 5 ans, soit un niveau bien supérieur à l’objectif de la FED. Deux hausses de taux sont désormais anticipées d’ici fin 2022, sans altérer la hausse des marchés actions.