Plus de 8 milliards de tonnes : c’est la consommation mondiale de charbon en 2022, selon les estimations de l’AIE (Agence Internationale de l’Energie), soit une augmentation de 1,2% par rapport à 2021. Le coupable est tout trouvé : la crise énergétique, qui a poussé au recours accru à cette matière première, afin de générer de l’électricité. Le comble du comble est que l’Europe, censée montrer l’exemple avec sa Taxonomie, en a consommé 9 % de plus, par rapport à 2021. Ainsi, de nombreuses centrales, vouées à être fermées ont été relancées. Malgré l’explosion des prix, le charbon reste compétitif par rapport au gaz naturel. D’après l’AIE, ce n’est qu’à partir de 2024 que cet avantage disparaîtra et que le déclin s’amorcera en Europe. Toutefois, la trajectoire mondiale dépendra avant tout de la Chine (53 % de la consommation). Cette énergie couvre, actuellement, 60 % de ses besoins et constitue « la colonne vertébrale » de son économie. Malheureusement, ce ratio devrait encore progresser, puisque l’Empire du Milieu ne cesse de commander ou de mettre en service de nouvelles centrales.
Le véritable problème est bien entendu écologique, car la combustion de cette roche, représente 40% des 36,3 gigatonnes de dioxyde de carbone (CO2) émis par le secteur de l’énergie en 2021. Cela en fait la première source d’émissions de ce gaz, principal acteur du réchauffement climatique. Selon l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie, le bilan carbone du charbon pour la production d’électricité est le pire (1 058 g CO2 e/kWh), comparé au gaz naturel (443 g CO2e/kWh). Les énergies renouvelables sont à favoriser : le solaire (55 g CO2 e/kWh) et l’éolien (14 g CO2e/kWh). La palme de l’électricité la plus décarbonée revient au nucléaire avec 3,7 g CO2e/kWh (d’après la dernière étude d’EDF du 16 juin 2022), dont seulement 0,3 g pour sa simple exploitation. L’essentiel des émissions étant lié à la construction des centrales et à l’extraction du minerai.
Alors, pourquoi utilisons-nous encore ce combustible, malgré son degré de nuisance ? Tout simplement parce que personne n’est d’accord sur la solution de remplacement. Les énergies renouvelables demandent beaucoup de terres rares, n’ont pas un très bon rendement énergétique et sont surtout des énergies intermittentes. En réalité, l’Union européenne est divisée en deux : les écologistes, partisans du gaz naturel, face à ceux du nucléaire. L’opposition farouche à l’énergie la plus décarbonée, remonte aux années 50, car confondue avec la bombe de destruction massive. Résultat, le mouvement écologiste est incapable dans de nombreux pays de remettre en cause son fondement idéologique, quitte à recevoir, comme ce fut le cas pour la Fondation allemande pour la protection du climat et de l’environnement, 192 millions d’euros de subventions de la part de … Gazprom.
Rien n’est perdu car le Conseil de l’Europe et le Parlement européen sont parvenus, le 18 décembre, à un accord sur deux des mesures les plus emblématiques du « Green Deal » : la réforme du marché d’échange de crédit carbone (EU ETS) et l’instauration d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF). En pratique, les entreprises qui importent des produits dans l’UE devront acheter des certificats sur le marché du carbone EU ETS, taxant de facto ces marchandises venant de pays tiers où les objectifs climatiques sont moindres. La Chine, qui a déjà lancé l’an passé un marché du carbone calqué sur le modèle européen, réfléchirait à adopter un mécanisme similaire au MACF. Tout ceci milite pour une nouvelle hausse du prix du CO2, autour de 100 €, contre 85 € actuellement, pénalisant les sociétés ayant un mauvais bilan carbone et favorisant celles les plus avancées sur la décarbonation de leurs activités. Un avantage compétitif leur permettant de minimiser l’impact négatif dans leurs comptes.